Elon Musk, le désinformateur désinformé


Depuis le rachat de Twitter, le 27 octobre 2022, Elon Musk a libéré la parole de comptes connus pour leurs publications manipulatrices. Quitte à lui-même tomber dans leur panneau.

On peut devenir le maître des clés, et user de celles-ci pour s’enfermer à double tour dans une geôle étriquée. C’est le paradoxe d’Elon Musk, devenu propriétaire et patron de Twitter (devenu X en juillet) le 27 octobre 2022, et qui, un an plus tard, semble à tous points de vue prisonnier mental de la plate-forme.

Bien sûr, lorsque le capricieux patron de Tesla Motors et de SpaceX met la main sur le réseau social à l’oiseau bleu, l’un n’est pas un génie hermétique aux rumeurs, ni l’autre un havre de discussions mesurées. Twitter est déjà connu pour son chaos, et celui qui a été l’homme le plus riche du monde pour son usage immodéré de la plate-forme − à tel point qu’après avoir été accusé de manipuler le cours boursier de Tesla par des posts inconséquents, il s’était engagé en 2019, auprès du gendarme de Wall Street, à ne plus tweeter sur son entreprise.

Mais le mariage entre le réseau social le plus scruté des politiques et le milliardaire le plus imprévisible a vite accouché d’un festival d’allégations fantaisistes, tendancieuses et provocatrices. A peine Twitter racheté, le clivant entrepreneur relaie une théorie du complot à caractère homophobe, qu’il a trouvée sur un site conspirationniste d’extrême droite (il s’en excusera). Quelques semaines plus tard, alors que son management brutal sème la zizanie, il insinue qu’un ancien employé de Twitter, avec qui il est en conflit, promeut la sexualisation des enfants. Il avait déjà traité de pédophile un spéléologue qui avait eu le malheur de critiquer ses idées en 2018 – conciliante, la justice américaine n’y avait vu qu’une simple invective.

Mais pour Elon Musk, le faux n’est pas qu’une manière de gérer ses conflits. C’est un habit dont il se dévêtit de plus en plus rarement. L’entrepreneur internaute partage sans sourciller de faux articles de presse comme des citations apocryphes, sans jamais sembler s’être posé la question de leur authenticité.

Un internaute particulièrement crédule

A cet égard, rien n’est plus déstabilisant que d’étudier les réactions, parfois sans filtre, d’Elon Musk face à des assertions vérolées. Un influenceur trumpiste partage une vidéo manipulatrice, en tentant de faire croire contre toute évidence que les assaillants du Capitole, le 6 janvier 2021, étaient escortés par une police de mèche : le patron de la plate-forme saute à pieds joints dans le piège et écrit « c’est fou. Le public a été induit en erreur ».

Un certain Kanekoa the Great, autre influenceur d’extrême droite, s’interroge en rebond à un graphique sur l’évolution de la grippe, et feint de se demander « où est-elle passée en 2020 et 2021 ? ». Elon Musk réagit alors sans la moindre distance critique : « Bonne question », comme s’il ne lui incombait pas, pour reprendre l’antienne complotiste, de faire ses propres recherches. « Etrange », répond-il encore à un autre compte d’extrême droite qui venait de partager un graphique manipulateur sur les crimes racistes aux Etats-Unis.

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Catégorie article Politique

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